L'envers du monde

1-inedit-2.jpgLecture par l'auteur de L'envers des choses

 

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Lecture par l'auteur de Agencement du monde

 

 

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Lecture de l'Homme du canal

 

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Pour présenter « L’envers du monde » d’Yves Carchon

D’Yves Carchon (né en 1948), on peut dire sans hésiter qu’il est un touche à tout – doué – des lettres. Auteur de 5 romans* chez divers éditeurs, de pièces de théâtre (« La cage », récemment, a été créée à Kinshasa), de récits de voyages, de poèmes et de chroniques, il a également à son actif de nombreux contes et nouvelles. Parmi celles-ci se détachent singulièrement ces « micro-fictions » dont il réunit aujourd’hui une première sélection sous l’intitulé « L’envers du monde ». Par leur brièveté – 10 à 20 lignes -, elles évoquent spontanément le poème en prose cher à Baudelaire, ou même ces proses poétiques dans lesquelles des écrivains comme Léon-Paul Fargue, Julien Gracq ou Gérard Macé ont souvent mis le meilleur d’eux-mêmes. De façon diffuse, la poésie irrigue ces textes sans que cela ne nuise d’ailleurs à leur caractère narratif qui les situe dans le champ de la nouvelle, disons à l’extrémité la plus condensée de ce genre*, aux antipodes, donc, de la nouvelle romanesque ou « novella ». Sur un mode hyper subjectif Yves Carchon nous raconte bien des histoires ; des histoires où s’entremêlent inextricablement impressions vécues, rêves et fantasmes ; des histoires souvent très sombres qui font la part belle à la perversion et au crime. Ou plutôt à leur désir au moment – troublant- de son surgissement dans la conscience, donnant ainsi une forme littéraire à ses pulsions, leur permettant d’aller jusqu’au bout d’elles-mêmes sur la scène de son esprit. En cela ses micro-fictions, d’une remarquable unité stylistique, justifient pleinement le titre de ce recueil et le romantisme obscur dont il est porteur. Explorateur des confins de l’âme, fasciné par son propre théâtre d’ombres toujours mouvantes et fugaces, Yves Carchon place d’emblée son lecteur au cœur de la crise morale qui se joue dans chacune de ses histoires, afin que celui-ci la médite sans délai. Le suivre à travers ses inquiétants  méandres, c’est aussi aller à la découverte de ses vérités cachées. Et l’on comprend ainsi que ce petit livre n’a pas tant vocation à plaire qu’à remuer et – peut-être – inspirer ceux et celles qui s’y aventureront sur la pointe des pieds.

              Jacques LUCCHESI 

  • Il faut lire, notamment, pour le lyrisme inspiré qui le parcourt d’un bout à l’autre, « Deux vies dans un vitrail » (éditions des Deux Fleuves, 1981)
  • Ainsi que l’a pratiqué, en particulier, un écrivain comme Jacques Sternberg.

Illustration de Jean-Paul Bocaj - Magazine Funambule n° 32 d'avril 2013

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L'Envers du monde est paru aux Editions du Port d'attache, dirigées par Jacques Lucchesi, éditeur courageux basé à Marseille qui édite aussi de la poésie. Il est lui-même auteur de nouvelles, romans, essais et pièces de théâtre.

Son blog rassemble aussi mes billets littéraires écrits durant 2011, 2012 et 2013.

 

 

 

Le blog de editionsduportdattache.over-blog.com

 

"Je n’ai pas eu l’occasion de te dire à quel point j’ai dégusté et savouré tes Microfictions. Certains textes, effectivement, empreints d’une humanité mélancolique et compassionnelle, font penser aux Petits poèmes en prose de Baudelaire. La plupart, par leur humour plutôt noir et un peu désespéré, renvoient aux Contes froids de Sternberg. Bien sûr, ces références n’enlèvent rien à la brillance de ces « éclats de vie et de rêves ». A cela s’ajoute que le livret lui-même est un joli objet..." JS

Extrait : L'envers des choses

J’ai toujours aimé l’Océan. Souvent nous y passions, Laura et moi, nos vacances d’hiver. Nous y avons vécu heureux avant qu’elle ne me quitte. Depuis, je m’y rends seul, mais c’est en rêve uniquement. J'arrive à pied et arpente la plage en regardant les vagues glisser sur le rivage. Nature sauvage, déserte qui m’agrée. Je crois savoir que je me trouve dans la forêt landaise. Entre la touffe des grands pins, se profile l'Édifice, usine désaffectée mangée par la broussaille et dont les portes sont rouillées. J'y entre et tombe sur une grande salle vide. Aux murs sont exposées les toiles du peintre que j’ai été. Il y a pourtant belle lurette que j’ai cessé de peindre. Apparemment, c’est une rétrospective organisée en mon honneur. Il n'y a pourtant que moi qui aille d'une toile à 1'autre, émerveillé, conquis, frappé par un embrasement de couleurs rouges et orangées qui font de chaque toile une sorte de brasier. En m’approchant, je m'aperçois que chaque touche évoque une flammèche. Toutes les touches peintes bout à bout donnent ce rendu d’intense flamboiement. Bravo, l’artiste, dis-je sans songer un seul instant que ce salut s’adresse à moi. Entre Laura, que je n’ai pas revue depuis des lustres. Lèvre boudeuse, œil moqueur, elle toise mon travail avec un air condescendant. « Je t’ai connu mieux inspiré ! » dit-elle en regardant par une fenêtre le bleu nacré de l’Océan.

 

 

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